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croisade contre les albigeois.

pour lui, il se défendra [675] dans Carcassonne, de tout son pouvoir. Le roi monte à cheval, avec grande douleur de ce que (le vicomte) s’est ainsi ravisé.

XXX.

Le roi Pierre d’Aragon s’en est retourné mécontent, et il souffre en son cœur de ne les avoir délivrés. [680] Il s’en retourne en Aragon courroucé et attristé. Ceux de l’armée se disposent à emplir les fossés, et font abattre du bois, et faire des chattes et des chats[1]. Les chefs de l’ost vont tout le jour armés, et cherchent par quel endroit les assiégés pourront être surpris. [685] L’évêque, les prieurs, les moines, les abbés s’écrient : « Au pardon ! que tardez-vous ? » Le vicomte et les siens sont montés sur le mur : ils lancent avec des arbalètes les carreaux empennés, et de part et d’autre il périt beaucoup de monde. [690] N’eût été l’affluence du peuple qui s’était réfugié là, d’une année ils n’eussent point été pris et forcés, car les tours étaient hautes et les murs pourvus de créneaux. Mais ils (les croisés) leur ont coupé l’eau, et les puits sont desséchés [695] par la grande chaleur et par le fort été. Par la puanteur des hommes qui sont tombés malades, et du nombreux bétail qui a été écorché dans la ville, et qu’on y avait rassemblé de tout le pays, par les grands cris que poussent de toutes parts [700] femmes et petits enfants dont ils sont encombrés[2]..... Les mouches, par suite de la chaleur,

  1. Voir au vocabulaire le mot gata.
  2. Voy. au t. I la note du v. 700.