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introduction, § ix.

verrons qui l’emportera, nous mettrons en récit ce dont nous serons informés, et écrirons encore tout ce dont il nous souviendra autant que la matière s’étendra depuis l’heure présente jusqu’à la fin de la guerre.

À la tirade suivante (CXXXI) nous retrouvons encore la main de Guillem :

Avant que la guerre s’arrête et ait pris fin, il y aura maint coup donné, mainte lance brisée ; maint gonfanon neuf sera planté par la prairie, mainte âme sera arrachée du corps, et mainte dame veuve ruinée. Le roi d’Aragon part avec sa mesnie. Il a mandé toute la gent de sa terre tellement qu’il en a rassemblé une belle et grande compagnie. À tous il a déclaré qu’il veut aller à Toulouse combattre la croisade qui dévaste et détruit toute la contrée. Le comte de Toulouse lui a demandé merci, afin que sa terre ne soit ni brûlée ni ravagée, car il n’a tort ni faute envers personne au monde. « Et comme il est mon beau-frère, qu’il a épousé ma sœur, et que j’ai marié mon autre sœur à son fils, j’irai les aider contre cette gent mauvaise qui veulent les déshériter. »

Mais aussitôt après on sent le style autrement vigoureux et la véhémence non contenue du continuateur :

Les clercs et les Français veulent déshériter le comte mon beau-frère et le chasser de sa terre ; sans tort ni faute qu’on puisse lui imputer, uniquement parce que c’est leur bon plaisir, ils le veulent déposséder.....

IX. L’auteur anonyme de la seconde partie de la chanson : circonstances et date de la composition.

Dès ce moment, et pendant près de 7000 vers, le poète, avec une ardeur qui va croissant toujours, nous entraîne à travers les événements de la croisade, s’attachant aux grandes situations, esquissant de vastes tableaux qui se succèdent sans transition, qu’il peuple de personnages vivant, agissant, surtout parlant : les uns, les partisans de Toulouse, passionnés pour le Parage, pour le Droit, pour leur personnification vivante, le jeune comte de Toulouse ;