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Le point de vue qui commence cependant à prédominer, du moins dans l’opinion publique, consiste à adopter la politique de temporisation.

Ses partisans indiquent que la situation intérieure du Japon — par suite de la rapide croissance du mouvement démocratique — comme la situation extérieure — par suite du mouvement révolutionnaire en Corée et de l’impopularité de l’aventure sibérienne — ayant tendance à devenir de jour en jour plus compliquée le temps travaille pour la Chine qui a tout intérêt de ne pas se presser.

D’ailleurs, elle ne risque rien.

Le Japon a donné une promesse solennelle d’évacuer le Chantong et de restituer Kiaotcheou à la Chine.

Si aucune négociation n’est nécessaire entre la France et l’Angleterre pour l’évacuation du territoire français, pourquoi sont-elles nécessaires pour l’évacuation du Chantong ?

Il est impossible pour le Japon d’annoncer aux Puissances alliées et associées qu’il n’évacue pas le Chantong pour cette raison que la Chine refuse de négocier car on ne manquerait pas de lui demander, négocier quoi ? — ce qui amènerait l’arbitrage du différend sino-japonais — c’est à-dire la chose que le Japon désire le moins.

M. Putnam Weale dans un récent article indique que les documents concernant les droits allemands sur les mines et les chemins de fer du Chantong contiennent des stipulations accordant à la Chine le droit de rachat. Par conséquent — dit-il — si le Japon avant le 10 avril n’obtient pas par des nouveaux accords avec la Chine un nouveau statut pour ces entreprises, elles resteront sur une base ancienne donnant à la Chine le droit de rachat, droit que le Japon ne pourra discuter puisque cela signifierait la violation du Traité de Versailles.

C’est le désir d’obtenir ce nouveau statut et de maintenir — malgré sa promesse à la Conférence — ses troupes à Tsinanfou et à Tsingtao qui aurait amené le gouvernement de Tokio à faire sa démarche à Pékin pour entamer des négociations directes.

Tout en reconnaissant le bien-fondé de ces suppositions, nous croyons que l’arrangement — ne fut-ce que temporaire — du différend sino-japonais est recherché par le Japon surtout dans le but de faire coopérer la Chine à la réalisation de ses plans ambitieux en Sibérie.

Étant donné l’union sacrée qui s’est formée entre toutes les classes de Sibérie devant la menace japonaise, les militaristes nippons n’ont d’autre prétexte pour l’intervention ultérieure que celui de protéger les frontières chinoises contre la soi-disant menace bolcheviste en faisant entrer en vigueur le Pacte Militaire ce qui, naturellement, ne peut être fait tant que les rapports sino-japonais ne s’améliorent — ne serait-ce qu’extérieurement.

On peut même prévoir que le Japon consentirait dans le cas de nécessité à « sacrifier » certains de ces droits au Chantong pour pouvoir seulement faire entrer en jeu le pacte militaire et prévenir l’alliance entre la République russe et la République chinoise, alliance qui porterait un coup mortel aux plans ambitieux de l’Empire japonais.

La seule chose qui pourrait amener le triomphe du Japon impérialiste, c’est la discorde entre les peuples du continent Voilà pourquoi si la devise du Japon est « diviser pour conquérir » les peuples qui résistent à ses empiètements doivent enfin comprendre, eux aussi, que c’est leur union qui fera leur force.

A. N.

VII. — LA RÉVOLTE À FORMOSE

Tokio, 30 Juillet. — On annonce un grand soulèvement d’aborigènes de Formose à Taichu. La police a eu des difficultés à tenir tête aux Formosans, qui ont attaqué le poste de police et se sont emparés de munitions. Les autorités vont adopter des mesures rigoureuses.

(Le Temps, 1er Août 1920).