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Page:La Corée Libre, numéro 4 et 5, août-septembre 1920.djvu/35

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eux, auprès du résident supérieur japonais, ni les droits essentiels de libre circulation, d’association, de réunion, de pétition, de publication, etc.

Aujourd’hui, même une autonomie sincère ne réaliserait pas les vœux de l’élite coréenne. C’est l’indépendance totale que réclame le gouvernement provisoire de la République de Corée, établi à Shanghaï, sous la direction du premier ministre l’Hon. D. L. Lee.

Tous les amis de la liberté et de la justice internationale doivent suivre avec sympathie les efforts des Coréens, comme ceux de tous les peuples sou- mis à une domination étrangère et aspirant à s’en affranchir.

Félicien Challaye.
(L’Europe Nouvelle, 22 août 1920.)

IV. — UNE AUTRE ÉGYPTE

Le Temps résumait une dépêche de Shanghaï donnée comme un « communiqué du gouvernement de la Corée » et annonçant que la péninsule aurait été complètement nettoyée des révolutionnaires qui employaient les procédés bolchevistes, pillaient les bureaux de l’administration et tuaient les agents de police.

La dépêche dit, en outre, que les membres du Congrès américain, venus pour étudier sur place la question d’Extrême-Orient, sont attendus à Séoul le 28 août et que, dans le but de provoquer des complications internationales, les révolutionnaires auraient l’intention de faire dérailler le train qui doit amener les enquêteurs !

Nous ne sommes guère, en France, au courant des choses d’Extrême-Orient, et cette dépêche, par suite, nous paraîtra assez obscure.

De qui émane-t-elle au juste ? Il y a, à Shanghai, un gouvernement provisoire de la République coréenne, antijaponais par conséquent, et qui revendique l’indépendance de la Corée. Est-ce lui qui parle ? [1]

Si oui, quels sont les révolutionnaires dont la défaite semble le réjouir ? Pourquoi ces révolutionnaires comploteraient-ils contre les Américains, que les Japonais accusent précisément d’être trop favorables aux Coréens ?

Il nous faudrait, pour y voir clair, des précisions qui nous manquent.

Mais, quoi qu’il en soit, nous sommes assez renseignés pour savoir qu’il se passe là-bas, au pays du « Matin Calme », des choses qui ressemblent beaucoup à ce qui se passe au pays des Pyramides. La Corée a le Japon, comme l’Égypte a l’Angleterre. La Corée, comme l’Égypte, se révolte pour être libre.

Dans le dernier numéro de l’Europe nouvelle, M. Félicien Challaye, qui visita Séoul en 1917 et en 1919, nous parle en témoin du régime auquel est soumise la Corée.

Comme l’Angleterre à l’Égypte, le Japon avait promis à la Corée de ne porter aucune atteinte à son indépendance. En conséquence de quoi, il proclama le protectorat en 1905, et l’annexion pure et simple, en 1910. Comme les Anglais en Égypte, les Japonais ont, dans une certaine mesure, amélioré la situation matérielle de leurs nouveaux sujets. Ils ont construit des chemins de fer, ouvert des routes, créé des hôpitaux. Mais les Coréens, dont la civilisation est plus ancienne que celle du Japon, les Coréens, qui ont été les éducateurs du Japon, ne peuvent pas se résigner à vivre sous la tyrannie japonaise, tyrannie militariste et brutale qui révolte tout en eux.

Hélas ! ils sont sans défense contre leurs maîtres. Comme les Égyptiens, ils sont sans armes, et aussi comme ces Hindous, qui déclarent ne pas vouloir tuer et être prêts à tout pour reconquérir leur indépendance sans verser le sang.

(1) C’est, en effet, un communiqué du « Gouvernement de la Corée », mais du Gouvernement Japonais, c’est-à-dire émané du Gouverneur général de la Corée, ce qui en explique aisément la teneur. N.D.I.R.

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