Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 2.djvu/116

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la vérité ? Oui, madame, lui répondis-je, et elle est comme je l’ai dite à votre majesté. Venez ce soir, à l’heure que je dois écrire, répliqua-t-elle, et j’achèverai de vous donner mes ordres. Je fis une profonde révérence, sans rien répondre, et ne manquai pas de me trouver à l’heure qu’elle m’avait marquée. Je la trouvai dans la galerie où était son secrétaire et quelqu’une de ses femmes. Sitôt qu’elle me vit, elle vint à moi, et me mena à l’autre bout de la galerie. Hé bien ! me dit-elle, est-ce après y avoir bien pensé que vous n’avez rien à me dire ; et la manière dont j’en use avec vous ne mérite-t-elle pas que vous me parliez sincèrement ? C’est parce que je vous parle sincèrement, madame, lui répondis-je, que je n’ai rien à vous dire ; et je jure à votre majesté, avec tout le respect que je lui dois, que je n’ai d’attachement pour aucune femme de la cour. Je le veux croire, repartit la reine, parce que je le souhaite ; et je le souhaite parce que je desire que vous soyez entièrement attaché à moi, et qu’il serait impossible que je fusse contente de votre amitié si vous étiez amoureux. On ne peut se fier à ceux qui le sont ; on ne peut s’assurer de leur secret. Ils sont trop distraits et trop partagés ; et leur maîtresse leur fait une première occupation qui ne s’accorde point avec la manière dont je veux que vous soyez attaché à moi. Souvenez-vous donc que c’est sur la parole que vous me donnez, que vous n’avez aucun engagement, que je vous choisis pour vous donner toute ma confiance. Souvenez-vous que je veux la vôtre tout entière ; que je veux que vous n’ayez ni ami, ni amie, que ceux qui me seront agréables, et que vous aban-