Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 2.djvu/157

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de madame de Clèves, qui soutient que cette aventure ne peut être véritable. Je ne crois pas en effet qu’elle le puisse être, reprit madame de Clèves, qui n’avait point encore parlé ; et, quand il serait possible qu’elle le fût, par où l’aurait-on pu savoir ? Il n’y a pas d’apparence qu’une femme capable d’une chose si extraordinaire eût la faiblesse de la raconter : apparemment son mari ne l’aurait pas racontée non plus, ou ce serait un mari bien indigne du procédé que l’on aurait eu avec lui. M. de Nemours, qui vit les soupçons de madame de Clèves sur son mari, fut bien aise de les lui confirmer ; il savait que c’était le plus redoutable rival qu’il eût à détruire. La jalousie, répondit-il, et la curiosité d’en savoir peut-être davantage que l’on ne lui en a dit, peuvent faire faire bien des imprudences à un mari.

Madame de Clèves était à la dernière épreuve de sa force et de son courage, et, ne pouvant plus soutenir la conversation, elle allait dire qu’elle se trouvait mal, lorsque, par bonheur pour elle, la duchesse de Valentinois entra, qui dit à madame la dauphine que le roi allait arriver. Cette reine passa dans son cabinet pour s’habiller. M. de Nemours s’approcha de madame de Clèves, comme elle la voulait suivre. Je donnerais ma vie, madame, lui dit-il, pour vous parler un moment ; mais, de tout ce que j’aurais d’important à vous dire, rien ne me le paraît davantage que de vous supplier de croire que, si j’ai dit quelque chose où madame la dauphine puisse prendre part, je l’ai fait par des raisons qui ne la regardent pas. Madame de Clèves ne fit pas semblant d’entendre M. de Nemours ; elle le quitta