Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 3.djvu/102

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toutes les fois qu’il cherche à plaire, et qu’il faudrait l’en haïr. En vérité, vous avez un frère bien singulier, et, si vous lui ressembliez, je ne vous aimerais pas autant que je vous aime.

Quand madame de Granson fut seule, elle ne put s’empêcher de repasser dans son esprit tout ce qu’elle venait d’entendre sur le caractère de M. de Canaple. Il croit donc, disait-elle, qu’il n’a qu’à aimer pour être aimé. Ah ! que je lui prouverais bien le contraire, et que j’aurais de plaisir à mortifier sa vanité ! Ce sentiment, que madame de Granson ne se reprochait pas, l’occupait plus qu’il ne méritait. Elle s’informait, avec quelque sorte d’empressement, du temps où M. de Canaple devait venir.

Ce temps ne tarda guère. M. de Granson annonça à sa femme l’arrivée de son ami, et la pria de trouver bon qu’ils logeassent ensemble, comme ils avaient toujours fait. À quelques jours de là, il lui présenta M. de Canaple. Peu d’hommes étaient aussi bien faits que lui ; toute sa personne était remplie de grâce, et sa physionomie avait des charmes particuliers dont il était difficile de se défendre.

Madame de Granson, quoique prévenue sur son caractère, ne put s’empêcher de le voir tel qu’il était. Pour lui, ses yeux seuls la trouvèrent belle ; et, dans cette situation où il ne craignait rien pour son repos, il ne contraignit point le talent qu’il avait naturellement de plaire. Attentif, rempli de soins, il voyait madame de Granson à toutes les heures, et il se montrait toujours avec de nouvelles grâces ; elles faisaient leur impression. Madame de Granson fut quelque temps