Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 3.djvu/195

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parais : être unie à moi était pour elle le souverain bien, le seul qui la touchait aussi. Dès le moment qu’elle m’avait aimé, le cloître avait cessé de lui paraître odieux. Tout ce qui n’était pas vous, me disait-elle, était égal pour moi. La solitude même avait l’avantage de me laisser jouir de mes sentiments, et de m’aider à les cacher.

Mes mesures prises, j’entrai une nuit dans le jardin, à l’aide d’une échelle de corde. Mademoiselle de Roye m’attendait dans ce jardin ; mais elle n’eut plus la force d’en faire davantage. Sans lui donner le temps de délibérer, je la pris entre mes bras ; je remontai le mur en la tenant toujours embrassée, et je la menai à une petite église peu éloignée, où j’avais fait tenir un prêtre. Je la remis dans le jardin de la même façon que je l’en avais fait sortir, et lui fis promettre qu’elle s’y rendrait la nuit suivante. Nous y en passâmes plusieurs autres. Imaginez, s’il vous est possible, quels étaient mes transports ; la tendresse de ma femme, toute légitime qu’elle était, ne se montrait qu’avec beaucoup de timidité ; et, lorsque je m’en plaignais : Le besoin que j’ai présentement que vous croyiez que je vous aime, me disait-elle, m’ôte la hardiesse de vous le dire et de vous le marquer.

Il m’aurait été aisé de l’enlever, et de l’emmener en Angleterre ; mais ce n’était point comme une fugitive que je voulais qu’elle y parût. Je me tenais assuré du consentement de mon père ; mais il convenait de prendre des mesures pour faire agréer au roi mon alliance avec une Française, et la rupture du mariage qu’il avait arrêté pour moi avec mademoiselle d’Hamilton. Il fallut