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FABLES CHOISIES.

Ces bleds ne devroient pas, dit-il, estre debout.
Nos amis ont grand tort, et tort qui se repose
Sur de tels paresseux à servir ainsi lents.
Mon fils, allez chez nos parens
Les prier de la mesme chose.
L’épouvante est au nid plus forte que jamais.
Il a dit ses parens, mere, c’est à cette heure…
Non mes enfans, dormez en paix ;
Ne bougeons de nostre demeure.
L’Aloüette eut raison, car personne ne vint.
Pour la troisiéme fois le Maistre se souvint
De visiter ses bleds. Nostre erreur est extrême,
Dit-il, de nous attendre à d’autres gens que nous.
Il n’est meilleur amy ny parent que soy-mesme.
Retenez bien cela, mon fils. Et sçavez-vous
Ce qu’il faut faire ? Il faut qu’avec nostre famille
Nous prenions dés demain chacun une faucille ;
C’est là nostre plus court ; et nous acheverons
Nostre moisson quand nous pourrons.
Déslors que ce dessein fut sceu de l’Aloüette,
C’est ce coup qu’il est bon de partir, mes enfans.
Et les petits, en mesme-temps,
Voletans, se culebutans,
Délogerent tous sans trompette.