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FABLES CHOISIES.

De la Discorde n’ont que faire.
Pour la faire trouver aux lieux où le besoin
Demandoit qu’elle fût présente,
La Renommée avoit le soin
De l’avertir ; et l’autre diligente
Couroit viste aux debats, et prevenoit la paix,
Faisoit d’une étincelle un feu long à s’éteindre.
La Renommée enfin commença de se plaindre
Que l’on ne luy trouvoit jamais
De demeure fixe et certaine.
Bien souvent l’on perdoit à la chercher sa peine.
II faloit donc qu’elle eust un sejour affecté,
Un sejour d’où l’on pûst en toutes les familles
L’envoyer à jour arresté.
Comme il n’estoit alors aucun Convent[1] de Filles,
On y trouva difficulté.
L’auberge enfin de l’Hymenée
Luy fut pour maison assinée[2].




XXI.
LA JEUNE VEUVE.



Ia perte d’un époux ne va point sans soûpirs ;
On fait beaucoup de bruit, et puis on se console.
Sur les aisles du temps la tristesse s’envole ;
Le temps rameine les plaisirs.
Entre la Veuve d’une année
Et la Veuve d’une journée
La difference est grande. On ne croiroit jamais

  1. Couvent, dans l’édition de 1668.
  2. Assignée, dans l’édition de 1668.