Aller au contenu

Page:La Fontaine - Œuvres complètes - Tome 1.djvu/250

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
244
FABLES CHOISIES.

L’homme lettré se teut, il avoit trop à dire.
La guerre le vengea, bien mieux qu’une satyre.
Mars détruisit le lieu que nos gens habitoient.
L’un et l’autre quita sa Ville.
L’ignorant resta sans azile ;
Il receut par tout des mépris :
L’autre receut par tout quelque faveur nouvelle.
Cela décida leur querelle.
Laissez dire les sots ; le sçavoir a son prix.




XX.
JUPITER ET LES TONNERRES.



Jupiter voyant nos fautes,
Dit un jour du haut des airs :
Remplissons de nouveaux hostes
Les cantons de l’Univers
Habitez par cette race
Qui m’importune et me lasse.
Va-t’en, Mercure, aux Enfers :
Ameine-moy la Furie
La plus cruelle des trois.
Race que j’ay trop cherie,
Tu periras cette fois.
Jupiter ne tarda guere
A moderer son transport.
O vous Rois qu’il voulut faire
Arbitres de nostre sort,
Laissez entre la colere
Et l’orage qui la suit
L’intervalle d’une nuit.
Le Dieu dont l’aisle est legere,
Et la langue a des douceurs,
Alla voir les noires Sœurs.