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Page:La Fontaine - Œuvres complètes - Tome 1.djvu/287

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LIVRE NEUVIÉME.

Aussi-tost fait, que dit : Raton avec sa pate
D’une maniere delicate
Ecarte un peu la cendre, et retire les doigts ;
Puis les reporte à plusieurs fois ;
Tire un maron, puis deux, et puis trois en excroque.
Et cependant Bertrand les croque.
Une servante vient : adieu mes gens ; Raton
N’estoit pas content, ce dit-on.
Aussi ne le sont pas la pluspart de ces Princes
Qui flatez d’un pareil employ
Vont s’échauder en des Provinces,
Pour le profit de quelque Roy.




XVIII.
LE MILAN ET LE ROSSIGNOL[1].



Apres que le Milan, manifeste voleur,
Eût répandu l’alarme en tout le voisinage,
Et fait crier sur luy les enfans du village,
Un Rossignol tomba dans ses mains, par malheur.
Le heraut du Printemps luy demande la vie.
Aussi bien que manger en qui n’a que le son ?
Ecoûtez plûtost ma chanson ;
Je vous raconteray Terée et son envie.
Qui, Terée ? est-ce un mets propre pour les Milans ?
Non pas, c’étoit un Roy dont les feux violens
Me firent ressentir leur ardeur criminelle :
Je m’en vais vous en dire une chanson si belle
Qu’elle vous ravira : mon chant plaist à chacun.
Le Milan alors luy replique :

  1. Dans l’édition originale de 1679, les fables de ce livre, à partir de celle-ci, ne portent plus de numéro.