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LIVRE DOUZIÉME.




FABLE II.
LE CHAT ET LES DEUX MOINEAUX
A MONSEIGNEUR LE DUC DE BOURGOGNE.



Un Chat contemporain d’un fort jeune Moineau
Fut logé prés de lui dés l’âge du berceau.
La Cage et le Panier avoient mêmes Pénates.
Le Chat étoit souvent agacé par l’Oiseau ;
L’un s’escrimoit du bec, l’autre joüoit des pates.
Ce dernier toutefois épargnoit son ami.
Ne le corrigeant qu’à demi
Il se fût fait un grand scrupule
D’armer de pointes sa ferule.
Le Passereau moins circonspect
Lui donnoit force coups de bec ;
En sage et discrette personne
Maître Chat excusoit ces jeux.
Entre amis il ne faut jamais qu’on s’abandonne
Aux traits d’un couroux serieux.
Comme ils se connoissoient tous deux dés leur bas âge,
Une longue habitude en paix les maintenoit ;
Jamais en vrai combat le jeu ne se tournoit.
Quand un Moineau du voisinage
S’en vint les visiter, et se fit compagnon
Du petulant Pierrot, et du sage Raton ;
Entre les deux Oiseaux il arriva querelle ;
Et Raton de prendre parti.
Cet inconnu, dit-il, nous la vient donner belle

    C’est la loüange ; ses propos
    Sont faits pour occuper vostre ame toute entiere.

    Ces six vers ont été retranchés dans l’édition de 1694.