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TROISIESME PARTIE [1]




I. — LES OYES DE FRERE PHILIPPE.
Nouvelle tirée de Bocace[2].


Je dois trop au beau sexe ; il me fait trop d’honneur
De lire ces recits, si tant est qu’il les lise.
Pourquoy non ? c’est assez qu’il condamne en son cœur
Celles qui font quelque sottise.
Ne peut-il pas, sans qu’il le dise,
Rire sous-cape de ces tours,
Quelque avanture qu’il y trouve ?
S’ils sont faux, ce sont de vains discours ;
S’ils sont vrays, il les desaprouve.
Iroit-il aprés tout s’alarmer sans raison
Pour un peu de plaisanterie ?
Je craindrois bien plûtost que la cajolerie
Ne mist le feu dans la maison.
Chassez les soûpirans, Belles, souffrez mon Livre ;
Je réponds de vous corps pour corps :
Mais pourquoy les chasser ? ne sçauroit-on bien vivre
Qu’on ne s’enferme avec les morts ?

  1. Publiée en 1671.
  2. Decameron, giornata IV, dans le préambule.