Page:La Fontaine - Œuvres complètes - Tome 2.djvu/97

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
97
DEUXIESME PARTIE.

Ils sont passez : aprés quelques façons,
A pleines mains l’on les a laissez prendre.
La Femme.
Et pourquoy non ? c’estoit moy : vostre Epoux
N’a-t-il donc pas les mesmes droits sur vous ?
La Voisine.
Cette personne enfin sur l’herbe tendre
Est trebuchée, et, comme je le croy,
Sans se blesser ; vous riez ?
La Femme.
C’estoit moy.
La Voisine.
Un cotillon a paré la verdure.
La Femme.
C’estoit le mien.
La Voisine.
Sans vous mettre en courroux :
Qui le portoit, de la fille ou de vous ?
C’est là le point ; car Monsieur vostre Epoux
Jusques au bout a poussé l’avanture.
La Femme.
Qui ? c’estoit moy : Vostre teste est bien dure.
La Voisine
Ah ; c’est assez. Je ne m’informe plus ;
J’ay pourtant l’œil assez bon, ce me semble :
J’aurois juré que je les avois veus
En ce lieu-là se divertir ensemble.
Mais excusez, et ne la chassez pas.
La Femme.
Pourquoi chasser ? j’en suis trés-bien servie.
La Voisine.
Tant pis pour vous : c’est justement le cas.