Page:La Fontaine - Œuvres complètes - Tome 4.djvu/290

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Le cœur était touché de leurs doctes images,
Les vives passions s’y faisaient admirer ;
On était assez sot pour y venir pleurer.
Mais les temps ont changé. La triste tragédie,
Pour plaire maintenant, en farce travestie,
Des jolis quolibets et des propos bouffons,
Préfère l’agrément à ses graves leçons :
Elle va ramasser dans les ruisseaux des halles
Les bons mots des courtauds, les pointes triviales,
Dont au bout du Pont-Neuf, au son du tambourin,
Monté sur deux tréteaux, l’illustre Tabarin
Amusait autrefois et la nymphe et le gonze
De la cour de Miracle et du cheval de bronze.
Voilà le véritable aimant des beaux esprits ;
Voilà, messieurs, aussi le chemin que j’ai pris.
Antoine et Cléopâtre à vos yeux vont paraître,
Non pas tels qu’ils étaient, mais comme ils devraient être,
Mais tels qu’il faut qu’ils soient pour captiver les cœurs,
Par la main des fripiers vêtus en bateleurs ;
Vous savez bien, Messieurs… Mais j’entends qu’on s’avance,
Messieurs, un petit air avant que l’on commence.
Les violons jouent ; et, les violons jouant, les messieurs prennent place.


Scène II

.
Cléopatre, Charmion


Cléopâtre
, représentée par Ragotin


Non, non, je veux mourir ; ne m’en empêche pas.
Ah ! ah !

Charmion
, représentée par le décorateur


Le vilain ton ! Prenez-le un peu plus bas.
Ce n’est point là pleurer, c’est miauler, princesse.

Cléopâtre