Je veux miauler, moi.
D’où vient cette tristesse ?
Quelle raison vous fait négliger vos appas ?
En quel état ici paraissez-vous ? Hélas !
Une reine d’Égypte en habit d’Espagnole !
On va vous prendre ainsi pour Jeanneton la folle.
Allez couvrir ce corps d’un autre accoutrement ;
Dans votre garde-robe entrons vite un moment ;
Venez vermillonner ce visage de plâtre.
Nourrice, au nom des dieux, laisse là Cléopâtre ;
Elle ne pense plus qu’à mourir.
À mourir ?
De noirs pressentiments viennent m’en avertir.
J’ai songé cette nuit un songe épouvantable :
En tombant, mon miroir s’est cassé sur ma table ;
Mon lacet s’est rompu, mon collier défilé ;
Antoine, étant venu chez moi, s’en est allé ;
Je me suis mise au bain, l’eau paraissait bourbeuse ;
Le ciel brillait d’éclairs, la mer était grondeuse ;
De funestes oiseaux frappaient l’air de leurs cris ;
J’ai vu des loups-garous, des hiboux, des esprits ;
Octave s’est rendu maître d’Alexandrie ;
Moi, pour me dérober à sa juste furie,
J’ai couru me cacher dans ces fameux tombeaux,
Où de feu mes aïeux sont les tristes lambeaux…