Page:La Fontaine - Fables, Bernardin-Bechet, 1874.djvu/367

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Comme un roi fit venir un berger à sa cour.
Le conte est du bon temps, non du siècle où nous sommes.

Ce roi vit un troupeau qui couvrait tous les champs,
Bien broutant, en bon corps, rapportant tous les ans,
Grâce aux soins du berger, de très-notables sommes.
Le berger plut au roi par ces soins diligents.
Tu mérites, dit-il, d’être pasteur de gens :
Lasse là tes moutons, viens conduire des hommes ;
Je te fais juge souverain.
Voilà notre berger la balance à la main.
Quoiqu’il n’eût guère vu d’autres gens qu’un ermite,
Son troupeau, ses mâtins, le loup, et puis c’est tout,
Il avait du bon sens ; le reste vient ensuite :
Bref, il en vint fort bien à bout.
L’ermite son voisin accourut pour lui dire :
Veillé-je ? et n’est-ce point un songe que je vois ?
Vous, favori ! vous, grand ! Défiez-vous des rois ;