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Le Bouif errant

lequel une belle négresse, entièrement nue, et carottée au poteau central, implorait la pitié du ciel avec des attitudes extrêmement académiques.

— Hum… Hum… grogna Sava. Voici une mise en scène bien moderne.

La victime se débattait de telle sorte que les Rôtisseurs avaient beaucoup de mal à se préserver des coups de pied de la Gallinacée récalcitrante.

— Comme elle se débat, fit Mitzi.

— Trop… dit le sceptique Ladislas.

À ce moment une voix décuplée, retentissante, sembla sortir des rochers et hurla des paroles confuses.

— Tiens… Tiens, ricana Ladislas : un cannibale parle français.

— Une exclamation angoissée de Mitzi le fit s’intéresser au spectacle.

La victime avait brisé ses liens et s’enfuyait éperdument. La troupe forcenée la poursuivait en gambadant et en donnant des signes exagérés de fureur, Levant sa massue emplumée, un gigantesque gaillard allait atteindre la malheureuse lorsqu’un cri terrible, venant du Ciel, l’arrêta net.

— Fripouille ! hurlait, dans son porte-voix, Robinson-Crusoé-Bicard. Haut les mains !… Haut les mains ! ou je te brûle.

Le Bouif, superbe d’indignation, venait de bondir en bas de son observatoire et menaçait de son fusil le cannibale sanguinaire.

Tous les anthropophages s’étaient arrêtés comme un seul homme. Quand au sauvage menacé par Bicard, il paraissait tellement ahuri que Sava sortit de sa cachette pour s’esclaffer à son aise.