Page:La Gerbe, nouvelles et poésies, tome 2, série 1, 1859.djvu/13

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— Eh ! bien ! mon cher, quand une femme se montrera indulgente et bonne pour une pauvre fille perdue comme moi, tu peux, sans craindre de te tromper, la proclamer une sainte femme : c’est qu’elle n’a pas besoin de nous jeter la pierre pour faire croire à sa vertu, et de nous noircir pour se rendre plus blanche.

Belle et Bonne et Clairette étaient deux anciennes compagnes, deux amies presque d’enfance : l’une avait suivi ses bons instincts, l’autre ses mauvais. L’une s’était mariée et vivait calme et heureuse, l’autre s’était jetée dans le vice et s’étourdissait dans le plaisir. Toutes les deux cependant avaient un bon cœur et s’aimaient. Clairette, qui se moquait de Dieu et du diable, rougissait devant Belle et Bonne, tandis que cette dernière, en songeant à son propre bonheur à jamais perdu pour sa compagne, la plaignait trop pour la mépriser.

— Que dis-tu donc, Clairette ? demanda la jeune femme en souriant. Pourquoi parles-tu bas en me regardant  ?

— Parce que je dis du mal de toi, Belle et Bonne, la bien nommée, répondit la jolie pécheresse avec gaîté… parce que, je ne sais pourquoi, je t’aime autant que je déteste ce qu’on appelle une honnête femme ; parce que je crois, ma parole, que s’il te