Page:La Gerbe, nouvelles et poésies, tome 2, série 1, 1859.djvu/39

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Adonis… Et t’as bonne opinion de ça, une femme comme toi !… tu devrais le mépriser.

— Avec le temps, ça se fera ; il y a commencement à tout.

— Écoute bien ce que je vais te prédire, dit l’ivrogne d’un ton doctoral en étendant le bras vers l’adolescent avec une majesté d’homme ivre : cet enfant-là ne fera jamais un homme.

Et il vida en roi son verre, qu’il tendit de nouveau à sa princesse sans le reposer sur la table.

— Du vin ! hurla celle-ci avec tant de force que le jeune homme endormi releva lentement sa jolie tête pâle et souffrante.

De nouveaux venus s’étaient emparés de la table inoccupée de l’autre côté de l’étranger.

— Tiens, fit l’un d’eux en s’approchant de lui, nous v’là en pays de connaissance. Salut, voisin.

— Salut, Hercule, répondit le charlatan en étendant les bras. Es-tu content de la journée ?

— Pas mal, pas mal. L’état est bon ; n’y fait pas concurrence qui veut. Mais les amis ne sont pas moins contents que moi ; la soirée a été chaude, et, ma foi, avant de se reposer, on vient boire à la santé du jour qui va venir. Mais tu m’as l’air triste, toi, l’ami… Qu’est-ce donc qui te chagrine ? N’as-tu pas vendu tes drogues ?