Page:La Guette - Mémoires, 1856.djvu/148

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
96
Mémoires

un bac[1]. Tout cela se fit heureusement, par la grâce de Dieu. Ensuite il fut question de songer à moi. Je partis pour Gros-Bois à six heures du matin et m’en allai les mains vides. Cela veut dire que j’emportai très-peu de choses et abandonnai tout le reste à la merci des gens de guerre. J’arrivai à bon port avec mes gardes et plusieurs personnes du lieu qui étoient restées et qui me suivirent. Je trouvai là des sauvegardes du Roi, des sauvegardes de M. le Prince, des sauvegardes du duc de Lorraine, ces deux-là mêmes qui y étoient venus la première fois. Il y en avoit aussi du duc de Vitemberg[2]. M. de Turenne trouva bon que mon Italien y demeurât. Le château étoit conservé comme la prunelle de l’œil. Il y avoit plus de dix mille paysans réfugiés, et plusieurs de la noblesse du pays ; car tout y accourut. La première rencontre que je fis dans ma chambre, ce fut d’une

  1. Il y a certainement là une erreur ou une lacune ; car la rivière de Marne ne coule pas entre Sussy et Gros-Bois. Je ne vois pas même que la carte de Cassini y marque le moindre cours d’eau. Madame de La Guette ne peut pas s’être trompée si grossièrement. Il faut que la faute soit au copiste ou à l’imprimeur. Peut-être tout le peuple se réfugia-t-il à Saint-Maur ; et alors il dut, en effet, traverser la Marne. Je verrois d’autant moins de difficulté à cette explication que madame de La Guette dit presque aussitôt : « Je partis pour Gros-Bois. » Pourquoi cette désignation si le peuple avoit suivi le même chemin ? On verra un peu plus loin que les saintes hosties trouvées dans le tabernacle de l’église de Sussy, après le départ des Lorrains, furent portées à la Varenne de Saint-Maur.
  2. Georges, duc de Wurtemberg. Il avoit un commandement dans les troupes espagnoles qui étoient jointes à celles du duc de Lorraine.