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Mémoires

plissement de leur mariage. En entrant dans sa chambre, je rencontrai la belle demoiselle dont M. de La Roche-Vernay, gouverneur de la Tour-Blanche, m’avoit tant parlé pour me donner de l’ombrage. Mon mari me dit : « Ma grande fille (car il m’appeloit toujours de la sorte), voilà Mlle de Pisany[1] ; saluez-la. » — « Je la vois bien, lui dis-je, » et lui passai devant le nez sans m’arrêter et n’en fis nul cas tout le temps que je fus là, me souvenant bien de ce que M. de La Roche-Vernay m’avoit dit.

M. le comte de Marsin revint de la ville à l’heure de dîner ; et si madame sa femme m’avoit bien reçue, il n’en fit pas moins, car il me dit tout ce qu’on peut dire d’obligeant à une personne que l’on considère. Après lui avoir répondu ce que je devois, je ne pus m’empêcher de lui dire la crainte que j’avois pour mon fils, et même le suppliai d’envoyer un trompette à Sarlat, pour savoir ce qu’il étoit devenu. Il me dit : « Ne vous mettez point en peine ; je m’en suis déjà informé ; votre fils se porte bien ; il est prisonnier ; nous l’aurons à quelque prix que ce soit. »

Le soir quand tout le monde fut retiré, nous demeurâmes seuls lui et moi, Mme de Marsin étant rentrée exprès dans sa chambre ; et il croyoit bien

  1. Catherine-Charlotte d’Angennes, troisième fille de la marquise de Rambouillet. Elle fut ensuite religieuse. « C’est, disoit d’elle en 1663 Tallemant des Réaux, une bonne fille, sans ambition, qui veut vivre dans une maison plus austère » (que Saint-Étienne de Reims, où sa sœur, Isabelle-Louise, étoit abbesse).