moins, et que je serai toujours bien aise de vous faire plaisir, quand l’occasion s’en présentera. » Il se retira là-dessus pour s’en revenir chez lui, où il me trouva de belle humeur. Je ne fus jamais autre, principalement quand nous étions ensemble. Je gardai mon petit Louison quinze jours auprès de moi et ensuite le renvoyai chez sa nourrice. Cependant les campagnes pour la guerre se suivoient, et il s’y falloit trouver. Mon mari n’y étoit jamais des derniers. Dans le peu de séjour qu’il fit auprès de moi, il vit mon père trois ou quatre fois ; mais il y avoit toujours de la froideur. Quant à moi, l’on me faisoit assez bon visage. Je demeurai encore grosse et dirai une seule fois pour toutes, que j’ai eu dix enfants, cinq garçons et cinq filles, tous assez honnêtes gens, dont je rends grâces à Dieu[1].
Quelque temps après, ma pauvre mère mourut étique ; je me trouvai à sa mort. Ah ! que ce coup me fut sensible ! J’en étois inconsolable ; et même, dans le transport de ma douleur, je lui soufflai un demi-quart d’heure dans la bouche, croyant que je lui redonnerois la vie. Je versai tant de larmes sur son visage et le lui touchai tant de fois, qu’il devint uni comme une glace, quoiqu’elle fût dans un âge avancé. Il me prit envie de séparer sa tête de son corps, pour la mettre dans mon cabinet et
- ↑ Les actes de baptême de 1635 à 1650 n’existent plus dans les archives de la paroisse de Sussy. De 1650 à 1665, année de la mort de M. de La Guette, il n’a été baptisé aucun enfant de son nom.