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qui distingue les différentes productions de Laharpe, il rappelle avec une douce indignation les critiques qui s’étaient élevées contre lui. On laisse passer légèrement ce que dit Marmontel du courage avec lequel notre jeune académicien défendit toujours la cause du bon goût, et l’on éclate en transports lorsque son panégyriste avoue que dans les disputes littéraires on lui avait souhaité quelquefois plus de modération, le sel du goût n’ayant pas besoin d’être mêlé du sel amer de la satire, etc. Tout ce détail, ajoute Grimm, est peut-être assez insipide à raconter ; mais il ne fut que trop plaisant pour les intéressés. Jamais éloge ne fit un effet plus contraire à celui que l’on devait naturellement attendre ; jamais on ne fit plus cruellement justice des torts qu’un homme de lettres peut avoir eus avec ses rivaux, et je connais peu de scènes de comédie plus piquantes que ne le fut ce singulier persifflage ; il eût été sans doute beaucoup plus original, si celui qui en fut l’objet, s’était mis à dialoguer avec le public, comme il a dit depuis qu’il en avait été tenté.

Il ne faut pas attacher autant d’importance que Grimm à cet événement insignifiant : toutefois on voit par les nombreuses attaques des adversaires de Laharpe, que s’il plaisait par ses talens littéraires, il n’avait pas du moins l’art de captiver par sa conduite la bienveillance générale. Lorsqu’on donna au théâtre les Journalistes anglais, par Cailhava, le public, ou une partie du public voulut y voir une satire sanglante de Laharpe ; on reconnut ses querelles avec Sauvigny, avec Blin de Saint-Maure, on retrouva ses expressions, et quelquefois ses injures. Ce ne fut qu’un des mille et un désagrémens que lui attira l’aigreur de sa