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ser de descendre à terre ; et le désir de vendre ses marchandises, le premier mobile de tous les navigateurs commerçans, le fit consentir imprudemment à cette demande. Ce qui peut excuser sa confiance, c’est qu’il apportait une lettre du roi d’Angleterre pour le pacha de Zénan, accompagnée de présens. Cependant le plus sûr aurait été de demander des otages avant de se remettre entre les mains d’hommes aussi perfides que les Turcs, et bien dignes en tout temps du nom de barbares. Il ne tarda pas à reconnaître la faute qu’il avait faite. L’aga, comme tous les commandans turcs, ne cherchait que le pillage, et s’embarrassait peu du commerce des marchands arabes de Moka. Ceux-ci même avaient averti Middleton de se défier des Turcs. Mais l’aga, qui ne cherchait sans doute qu’à attirer à terre plus d’Anglais et de marchandises, ne cessa, durant huit jours que l’amiral passa dans la ville avec sa suite, de le traiter avec les politesses les plus distinguées. Elles finirent par une insigne trahison. Les Turcs fondirent à l’improviste dans la maison de l’amiral, lui tuèrent huit hommes, en blessèrent quatorze. Lui-même fut renversé d’un coup qui le fit tomber sans connaissance. On lui lia les mains derrière le dos, et en cet état il fut traîné avec les siens dans un cachot et chargé de grosses chaînes. Tel est le traitement, digne des peuplades sauvages, que reçut dans une ville de commerce un amiral anglais chargé de lettres de son maître.