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Pendant ce temps, cent cinquante soldats turcs, déguisés et sans turbans, essayèrent de surprendre le Darling, un des vaisseaux anglais qui était le plus proche du rivage. Ils vinrent dans trois grandes barques, et, étant entrés dans le vaisseau à la faveur de leur déguisement, ils commencèrent à faire main-basse sur les Anglais ; et l’équipage, qui n’avait pas eu le temps de se reconnaître, fut un moment en danger. Mais, dès qu’on eut couru aux armes, le triomphe des traîtres ne fut pas long. Ils furent tous égorgés en demandant la vie qu’ils ne méritaient pas.

Cependant l’aga fit venir l’amiral devant lui, et eut l’insolence de lui demander comment il avait été assez hardi pour venir dans le port de Moka, si près de la Ville Sainte. Middleton lui répondit qu’il n’y était entré que sur les instances et les promesses qu’on lui avait faites, et sur la foi des traités qui subsistaient entre le roi d’Angleterre et le grand-seigneur. L’aga répliqua qu’il n’était pas permis aux chrétiens d’approcher de la Ville Sainte, ni de Moka, qui en était la clef ; que le pacha avait ordre de faire esclaves tous ceux qui se présenteraient. Le grand-seigneur n’ordonnait pas sans doute qu’on attirât les étrangers dans des piéges pour les arrêter par trahison. Mais, si les ordres qu’alléguait ce Turc étaient réels, quelle stupidité de la part du divan de Constantinople d’éloigner les commerçans qui apportaient leurs richesses dans ses ports, et qui venaient