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role. Son amant, pénétré d’un accident si tragique, ne vécut que cinq jours après elle, et demanda pour unique grâce à ses amis de l’enterrer dans le même tombeau. Ils avaient creusé sa fosse au pied d’une sorte d’autel qu’ils avaient élevé sous le grand arbre ; ils y placèrent aussi le malheureux Macham ; et, mettant une croix de bois sur ce triste monument, ils y joignirent une inscription qu’il avait composée lui-même, et qui contenait en peu de mots sa pitoyable aventure. Elle finissait par une prière aux chrétiens, s’il en venait après lui dans le même lieu, d’y bâtir une église sous le nom de Jésus Sauveur.

Après la mort du chef, le reste de la troupe ne pensa qu’à sortir d’un lieu si désert. Tous les soins furent employés à mettre la chaloupe en état de soutenir une longue navigation, et l’on mit à la voile dans la vue, s’il était possible, de retourner en Angleterre ; mais la force du vent, ou l’ignorance des matelots, ayant fait prendre la même route que le vaisseau, on alla tomber sur la même côte, et l’on n’y éprouva pas un meilleur sort.

Les prisons de Maroc étaient alors remplies d’esclaves chrétiens de toutes les nations, comme celles d’Alger le sont aujourd’hui. Il s’y trouvait un Espagnol de Séville, nommé Jean de Moralès, qui, ayant exercé long-temps la profession de pilote, prit beaucoup de plaisir au récit des prisonniers anglais. Il apprit d’eux la situation du nouveau pays qu’ils avaient dé-