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par un discours prononcé avec le même courage, il leur inspira une partie de sa résolution. L’air étant calme et les courans fort rapides, il fit conduire son vaisseau le long de la nuée par deux chaloupes. Le bruit servait de marque pour s’avancer ou se retirer, suivant qu’il paraissait plus ou moins violent. Déjà la nuée commençait à diminuer par degrés. Du côté de l’est, elle était sensiblement moins épaisse ; mais les vagues ne cessaient point de faire entendre un bruit effrayant. On crut bientôt découvrir au travers de l’obscurité quelque chose de plus noir encore, quoiqu’à la distance où l’on était, il fût impossible de le distinguer. Quelques matelots assurèrent qu’ils avaient aperçu des géans d’une prodigieuse hauteur : ce n’étaient que les rochers, qu’on vit bientôt a découvert. La mer s’éclaircissant enfin, et les vagues commençant à diminuer, Zarco et Moralès ne doutèrent plus qu’on ne fût peu éloigné de la terre. Ils la virent presque aussitôt lorsqu’ils n’osaient encore s’y attendre. La joie des matelots se conçoit plus aisément qu’elle ne peut s’exprimer. Le premier objet qui frappa leurs yeux fut une petite pointe, que Zarco nomma la pointe de Saint-Laurent. Après l’avoir doublée, on eut au sud la vue d’une terre qui s’étendait en montant ; et l’ombre ayant tout-à-fait disparu, la perspective devint charmante jusqu’aux montagnes.

Ruy Paes fut envoyé dans une chaloupe, avec Jean de Moralès, pour reconnaître la côte. Ils entrèrent dans une baie, qu’ils trouvèrent con-