Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 1.djvu/321

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sait point au-dessus du vent quelque endroit où l’on put mouiller. Le Nègre répondit non, et que, si l’on ne gagnait pas le rivage avant qu’on eût passé la Punta do Sal, non-seulement il serait impossible d’aborder, mais très-difficile d’éviter le naufrage. Roberts lui demanda conseil. « Je n’en ai pas d’autre à vous donner, lui dit le Nègre, que d’aborder sur les rocs, d’où chacun se sauvera comme il pourra. Mais je ne sais pas nager, lui répondit Roberts, et mon matelot non plus. » La réplique du Nègre fut, qu’étant si près des rocs il allait aborder. Roberts, prenant son fusil, lui dit qu’il saurait empêcher qu’on lui fît violence sur son bord. Le Nègre sauta aussitôt dans l’eau en lui souhaitant une bonne fortune ; il gagna la terre à la nage. Ses deux compagnons, qui ne savaient pas si bien nager, n’osèrent suivre son exemple, et protestèrent même qu’ils n’étaient pas capables de laisser Roberts sans secours ; mais ils le prièrent aussi de ne les pas abandonner aux flots sans eau et sans provisions. Il leur dit qu’il ne cherchait que le moyen d’aborder dans un lieu sûr, ou même de se faire échouer ; et lorsqu’ils lui représentèrent de quoi Colau l’avait menacé, il répondit que ce perfide, comme ils avaient pu le remarquer eux-mêmes, s’était attribué des connaissances qu’il n’avait pas. Alors les deux Nègres chargèrent Colau d’imprécations, et souhaitèrent de le voir périr avant qu’il pût atteindre les rocs. Roberts leur dit que, s’ils voulaient travailler à la poupe pour soulager un peu