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J’ai perdu ma femme et ma vie. Accablé de tristesse et de douleur, j’irai dans les bois, j’arracherai l’écorce des arbres et je la mangerai. Je me lèverai de grand matin, je chasserai le canard aanghitche pour le faire aller dans la mer. Je jetterai les yeux de tous côtés pour voir si je ne trouverai pas quelque part celle qui fait l’objet de ma tendresse et de mes regrets.

Cette chanson s’appelle aanghitche, parce qu’elle est notée sur les tons du cri de cet oiseau.

Kracheninnikov a noté une autre chanson kamtchadale, faite en l’honneur de quelques Russes. On y remarque ces couplets :

Si j’étais cuisinier de M. l’Enseigne, je n’ôterais la marmite qu’avec des gants.
Si j’étais M. le Major, je porterais toujours une belle cravate blanche.
Si j’étais Ivan, son valet, je porterais de beaux bas rouges.
Si j’étais étudiant, je décrirais toutes les belles filles.


Cet étudiant est Kracheninnikov : la chanson veut aussi qu’il fasse la description de toutes les autres curiosités naturelles du Kamtchatka.

Du reste, il s’étonne que les Kamtchadales, qui montrent beaucoup de goût pour la musique, n’aient d’autre instrument qu’une espèce de flûte faite avec la tige de l’angélique ; « tuyau, dit-il, sur lequel on ne peut jouer aucun air. »