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permis à ceux qui jouissent de l’assiente d’apporter une certaine quantité de vivres pour leur subsistance et pour celle des esclaves qu’ils amènent. »

On va de Porto-Bello à Crucès en remontant la rivière de Chagre, et de Crucès on va par terre jusqu’à Panama. Toutes les montagnes et les forêts qui règnent des deux côtés du Chagre, sont remplies d’animaux, surtout de singes, dont les nègres, les créoles et les Européens même ne font pas difficulté de manger la chair. Don Ulloa fait une peinture très-vive du spectacle que les rivières de ce pays offraient à la vue : « Tout ce que l’art, dit-il, peut imaginer de plus ingénieux n’approche point de la beauté de cette perspective rustique, formé des mains de la nature. L’épaisseur des bocages qui ombragent les vallons, les arbres de différentes grandeurs qui couvrent les collines, la variété de leurs feuilles et de leurs rameaux, jointe à celle de leurs couleurs, font un coup d’œil auquel l’imagination ne peut atteindre. Ajoutons-y une prodigieuse quantité d’animaux qui forment d’autres nuances ; les singes de diverses espèces qui voltigent par troupes d’un arbre à l’autre, qui s’attachent aux branches, qui s’unissent sept ou huit ensemble pour passer la rivière ; les mères portant leurs petits sur le dos, avec cent grimaces et cent gestes ridicules ; les oiseaux propres au pays, dont le nombre est incroyable ; d’autres, semblables à ceux de l’Europe, tels que des paons