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marche. Mais cette rigoureuse ordonnance ne fut point exécutée, et l’on se contenta de m’abandonner à la merci des sauvages, avec M. Gobson, et Jean Hington, matelot, qui avait succombé comme moi à la fatigue du chemin.

» Quelques Américains, dont nous nous vîmes forcés d’implorer le secours, entreprirent de guérir ma plaie. Ils mâchèrent diverses herbes, dont ils firent une espèce de pâte, qu’ils étendirent sur une feuille de bananier ; et ce cataplasme fut appliqué sur le mal. Dans l’espace de deux jours, je me trouvai soulagé. Mais si nos hôtes avaient marqué de l’humanité sur ce point, nous étions peu satisfaits des alimens que nous recevions d’eux. Ils ne nous faisaient manger que des bananes vertes. Cependant un jeune Américain se dérobait quelquefois à la vue des autres pour nous en donner de mûres. Il avait été pris dans son enfance par les Espagnols, avec lesquels il avait demeuré assez long-temps pour apprendre leur langue ; et l’amour de sa famille lui avait fait trouver le moyen de se sauver de leurs mains. Comme nous savions un peu d’espagnol et quelques mots de sa langue, que nous avions appris en nous rendant de la mer du Nord à celle du Sud, il n’eut pas de peine à nous faire entendre que ses compatriotes n’étaient pas aussi méchans que nous pouvions nous l’imaginer, et que, s’ils nous traitaient avec un peu de rigueur, c’était pour nous punir d’avoir enlevé plusieurs habitans dans notre premier passage, et de les avoir for-