Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 15.djvu/36

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cés de nous servir de guides pendant les pluies. En effet, leur vengeance n’alla point jusqu’à les faire cesser de panser ma plaie avec les mêmes herbes, et ce remède me guérissait à vue d’œil.

» J’étais en état de me promener, lorsque Spratlin et Bowman, qui nous avaient laissés, nous surprirent agréablement par leur arrivée. Ils nous dirent que, rebutés de marcher sans guides au travers des bois, et de ne subsister que de quelques bananes que le hasard leur faisait rencontrer, ils s’étaient déterminés à prendre un chemin qu’ils avaient reconnu, au risque de tous les mauvais traitemens qu’ils pouvaient craindre des Américains. Je leur répondis qu’ils ne devaient pas espérer d’être mieux traités que nous ; et que leur vie même, non plus que la nôtre, n’était pas en sûreté, parce qu’on n’avait pas encore eu de nouvelles des guides que nos Anglais avaient enlevés.

» En effet, tous les habitans du canton, ne voyant pas revenir leurs amis après avoir attendu long-temps leur retour, perdirent patience, et tinrent plusieurs fois conseil sur la vengeance qu’ils devaient tirer de nous. Les uns proposaient de nous ôter la vie, les autres de nous garder parmi eux, et d’autres enfin de nous livrer aux Espagnols, dont ils connaissaient la haine pour nous. Mais, comme ils ne les haïssaient pas moins, ce dernier avis fut rejeté ; et le résultat de leurs délibérations fut de nous accorder encore dix jours, après lesquels ils résolurent de nous brûler vifs, si leurs amis ne re-