Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 15.djvu/92

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Cuença, que leurs ouvrages en laine, et la teinture qu’elles savent leur donner, font la ressource des familles, tandis que leurs maris vivent dans une honteuse oisiveté.

C’est à Loja que croît le fameux spécifique contre les fièvres intermittentes, connu en Espagne sous le nom de cascerilla de Loja, et dans le reste de l’Europe sous celui de quinquina. Joseph de Jussieu donna aux habitans de Cuença des instructions sur la meilleure manière de recueillir cette écorce, et leur enseigna aussi la manière d’en faire des extraits ; enfin il eut la satisfaction d’en établir l’usage dans ce pays, où il n’était point employé, quoique les fièvres dont il est le remède y règnent comme ailleurs. Les habitans s’imaginaient que cette drogue ne passait en Europe que pour y servir à la teinture des étoffes ; et quoiqu’ils n’ignorassent pas absolument sa vertu, ils la croyaient d’une qualité si chaude, qu’ils en appréhendaient même l’usage. Jussieu les désabusa par d’heureuses expériences. Depuis si long-temps qu’on coupe de ces arbres, il n’en resterait plus, si les graines qui tombent n’en produisaient d’autres : les montagnes en sont encore couvertes ; ce qui n’empêche point que la diminution n’en soit considérable, parce que les habitans du pays n’ayant point l’attention d’en semer, ceux qui croissent d’eux-mêmes n’égalent pas le nombre de ceux qu’on ne cesse point de couper. On a découvert dans le territoire de Cuença plusieurs montagnes