Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 16.djvu/15

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champs déserts, Maldonata découvrit une caverne qui lui parut une retraite sûre contre tous les dangers, mais elle y trouva une cougouare femelle dont la vue la saisit de frayeur. Cependant les caresses de cet animal la rassurèrent un peu ; elle reconnut même que ces caresses étaient intéressées : la cougouare était pleine et ne pouvait mettre bas ; elle semblait demander un service que Maldonata ne craignit point de lui rendre. Lorsqu’elle fut heureusement délivrée, sa reconnaissance ne se borna point à des témoignages passagers, elle sortit pour chercher sa nourriture, et depuis ce jour elle ne manqua point d’apporter aux pieds de sa libératrice une provision qu’elle partageait avec elle : ce soin dura aussi long-temps que ses petits la retinrent dans la caverne. Lorsqu’elle les en eut tirés, Maldonata cessa de la voir, et fut réduite à chercher sa subsistance elle-même ; mais elle ne put sortir souvent sans rencontrer des Indiens qui la firent esclave. Le ciel permit qu’elle fût reprise par des Espagnols qui la ramenèrent à Buénos-Ayres. L’adelantade en était sorti. Don François Ruiz de Galan, qui commandait en son absence, homme dur jusqu’à la cruauté, savait que cette femme avait violé une loi capitale, et ne la crut pas assez punie par ses infortunes. Il donna ordre qu’elle fut liée au tronc d’un arbre en pleine campagne pour y mourir de faim, c’est-à-dire du mal dont elle avait voulu se garantir par sa fuite, ou pour y être dévo-