Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 16.djvu/14

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travail, et bientôt les édifices furent assez nombreux pour servir de camp.

Mais les peuples du canton ne virent pas de bon œil un établissement étranger si près d’eux ; ils refusèrent des vivres. La nécessité d’employer les armes pour en obtenir donna occasion à plusieurs combats où les Espagnols furent maltraités. De trois cents hommes qui furent détachés sous Diègue de Mendoze, à peine en revint-il quatre-vingts. Il périt lui-même avec plusieurs officiers de distinction, entre lesquels un capitaine nommé Luzan fut tué au passage d’un ruisseau qui conserve encore son nom. La disette devint extrême à Buénos-Ayres, et l’adelantade n’y pouvait remédier sans risquer de perdre tout ce qui lui restait d’Espagnols. Comme il était dangereux d’accoutumer les Indiens à verser le sang des chrétiens, il défendit sous peine de mort de passer l’enceinte de la nouvelle ville ; et, craignant que la faim ne fît violer ses ordres, il mit des gardes de toutes parts, avec ordre de tirer sur ceux qui chercheraient à sortir.

Cette précaution contint les plus affamés, à l’exception d’une seule femme nommée Maldonata, qui trompa la vigilance des gardes. L’historien du Paraguay, se fiant ici au témoignage des Espagnols, raconte, sans aucune marque de doute, l’aventure de cette fugitive, et la regarde comme un trait de la Providence, vérifié par la notoriété publique. Elle mérite d’être rapportée. « Après avoir erré dans des