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prendre pour une colonie de cette nation, qui en a fondé plusieurs autres au Paraguay comme au Brésil, où leur langue se parle, ou du moins s’entend de toutes parts. Mais il paraît que les Espagnols n’ont pas d’ennemis plus irréconciliables que les Chiriguanes répandus en plusieurs endroits des provinces de Santa-Cruz de la Sierra, de Charcas et du Chaco. Quoique dans ces derniers temps ils aient eu dans cette nation des alliés qui les ont bien servis, ils ne peuvent compter sur eux qu’autant qu’ils peuvent les conduire par la crainte, et l’entreprise n’est pas aisée. On ne connaît point dans cette contrée de nation plus fière, plus dure, plus inconstante et plus perfide. Toutes les forces du Tucuman n’ont pu les réduire : ils ont fait impunément quantité de ravages dans cette province, et le malheureux succès d’une expédition tentée en 1572 pour les soumettre, par don François de Tolède, vice-roi du Pérou, n’a fait qu’augmenter leur insolence.

On nous apprend que les Chiriguanes n’ont ordinairement qu’une femme, mais que souvent, parmi les prisonniers qu’ils font à la guerre, ils choisissent les plus jeunes filles pour en faire leurs maîtresses ; ce goût ne prouve pas clairement leur barbarie. Ce qu’ils ont de plus singulier, ajoute l’historien, c’est que d’un jour à l’autre ils ne sont pas les mêmes hommes : aujourd’hui pleins de raison et d’un bon commerce, demain pires que les tigres de