Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 18.djvu/246

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rient point, et s’abandonnent aux plus infâmes passions. On ajoute néanmoins que, dans leurs nations mêmes, ils sont souverainement méprisés. D’un autre côté, les femmes, quoique d’une complexion forte, sont peu fécondes. Outre plusieurs raisons, telles que l’usage de nourrir les enfans de leur lait jusqu’à l’âge de six ou sept ans, de ne point habiter avec leurs maris dans cet intervalle, et de n’en être pas moins ardentes au travail, on attribue surtout leur stérilité à l’infâme coutume qui permet aux filles de se prostituer avant leur mariage.

Il paraît certain au P. Charlevoix que les sauvages de la Nouvelle France ont de grands avantages sur nous. Il compte, dit-il, pour le premier la perfection de leurs sens. Malgré la neige qui les éblouit, et la fumée qui les tourmente pendant six mois de l’année, leur vue ne s’affaiblit point : ils ont l’ouïe extrêmement subtile, et l’odorat si fin qu’ils sentent le feu long-temps avant de l’avoir pu découvrir. C’est à cette raison sans doute qu’il faut attribuer leur aversion pour l’odeur du musc et pour toutes les odeurs fortes : on prétend même qu’ils ne trouvent d’agréable que celle des choses comestibles. Leur mémoire tient du prodige : il leur suffit d’avoir une fois passé dans un lieu pour en conserver une idée juste qui ne s’efface jamais. Ils traversent les forêts les plus vastes et les plus sauvages sans s’égarer, lorsqu’en y entrant ils se sont bien orientés. Les habitans de l’Acadie et des environs du golfe