Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 18.djvu/345

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heureux puissent résister à tous les maux qu’elles leur font souffrir. Si quelqu’une surtout a perdu dans la dernière action ou dans les guerres passées son fils ou son mari, ou quelque personne chère, fût-ce depuis trente ans, c’est une furie qui s’attache au premier qu’elle rencontre, et l’on n’entreprend point de représenter jusqu’où sa rage l’emporte ; toutes les lois de la pudeur et de l’humanité sont oubliées. Chaque coup qu’elle porte à sa victime ferait craindre qu’il ne fût mortel, si l’on ne savait combien ces barbares sont ingénieux à prolonger les plus horribles supplices. La nuit entière se passe au camp, dans toutes ces cruautés.

Le jour suivant est celui du triomphe des vainqueurs. On remarque, à l’honneur des Iroquois et de quelques peuples, qu’ils affectent dans cette occasion autant de modestie que de désintéressement. Les chefs entrent d’abord seuls dans la bourgade, sans aucun signe de leur victoire, gardent un profond silence, se retirent dans leurs cabanes, et ne marquent pas la moindre prétention sur les prisonniers. Chez d’autres nations, le chef, au contraire, marche à la tête de sa troupe de l’air d’un conquérant. Son lieutenant suit, précédé d’un crieur qui recommence les cris de mort. Les guerriers succèdent deux à deux. Entre les deux rangs marchent leurs prisonniers couronnés de fleurs, le visage et les cheveux peints, un bâton dans une main et le