Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 18.djvu/347

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pent sur eux comme s’ils voulaient les assommer. Cependant il n’arrive jamais qu’ils y succombent : quoiqu’on paraisse frapper à l’aveugle, et que la seule fureur semble conduire le bras, on observe de ne pas donner de coups qui puissent mettre la vie en danger. Dans leur marche, chacun a droit de les arrêter pour leur faire quelque insulte : il leur est permis de se défendre, mais on sent qu’ils ne peuvent jamais être les plus forts. Lorsqu’ils sont entrés dans la bourgade, on les conduit de cabane en cabane, et partout ils reçoivent quelque traitement cruel. Dans l’une, on leur arrache un ongle ; dans une autre, on leur coupe un doigt, tantôt avec les dents, tantôt avec un mauvais couteau qu’on emploie comme une scie. Un vieillard leur déchire la chair jusqu’aux os ; un enfant les perce en mille endroits d’une alêne ; une femme les fouette impitoyablement jusqu’à ce que les bras lui tombent de lassitude. Mais les guerriers, quoiqu’ils soient encore leurs maîtres, ne mettent jamais la main sur eux. On ne peut même les mutiler sans leur permission, qu’ils accordent rarement, et c’est la seule vengeance qui soit exceptée. S’ils sont promenés dans plusieurs villages, soit de la même nation, soit de ses voisins ou de ses alliés, qui demandent cette espèce de participation à la victoire, ils y sont reçus avec les mêmes excès de barbarie.

On travaille ensuite à leur répartition, et leur sort dépend de ceux auxquels ils sont li-