Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 18.djvu/414

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au-dessus du talon ; de sorte qu’à chaque pas qu’on fait sur la neige, le bout du pied s’enfonce dans le trou lorsqu’on lève le talon. On marche plus vite sur la neige avec ces machines qu’on ne ferait avec des souliers dans un chemin battu. J’ai fait ainsi trente et quarante lieues dans les bois à la chasse des orignaux. La première fois, après avoir fait quarante lieues au nord du fleuve Saint-Laurent, nous trouvâmes un petit lac de trois ou quatre lieues de circuit, où nous cabanâmes en écorces d’arbres, avec la peine d’ôter la neige qui couvrait le terrain. Nous tuâmes en chemin autant de lièvres et de gelinottes des bois que nous en pûmes manger. Les cabanes finies, quelques sauvages allèrent à la découverte des orignaux les uns au nord, d’autres au sud, jusqu’à deux et trois lieues. Celui qui découvrait des pistes fraîches se détachait pour nous en donner avis. Nous suivions ces pistes, et nous trouvions quelquefois dix, quinze ou vingt orignaux ensemble, qui, prenant la fuite en troupe ou séparément, s’enfonçaient dans la neige jusqu’au poitrail. Si la neige était dure ou couverte de quelque verglas, nous ne manquions pas de les joindre dans l’espace d’un quart de lieue ; mais, lorsqu’elle était molle, ou tombée la dernière nuit, nous les poursuivions trois ou quatre lieues, sans en pouvoir approcher, à moins qu’ils ne fussent arrêtés par les chiens dans quelque passage difficile. Nous en tuâmes soixante-six. Cette chasse dure jusqu’au dégel,