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rieure était de grandeur ordinaire ; qu’on voyait entre les deux ses dents et ses gencives, et qu’aux deux coins de la bouche il avait quelques dents d’une grandeur extraordinaire ; que ses yeux étaient noirs et fort ouverts ; enfin que toute sa figure était terrible.

Cet accident fit perdre la pensée de renouveler la même entreprise, d’autant plus que les étrangers, irrités apparemment de l’insulte qu’ils avaient reçue, laissèrent passer trois ans sans reparaître au bord de l’eau. On était persuadé à Melli que leurs grosses lèvres s’étaient corrompues par l’excès de la chaleur, et que, n’ayant pu supporter plus long-temps la privation du sel, qui est leur unique remède, ils avaient été forcés de recommencer leur commerce. La nécessité du sel en était établie mieux que jamais dans l’opinion des Nègres de Melli. Ces faits, attestés avec les mêmes circonstances par beaucoup de voyageurs, ne sont pas faciles à vérifier : s’ils sont vrais, cette bonne foi réciproque et si constante dans le commerce des nations nègres prouve qu’il n’y a point de meilleur lien que l’intérêt. Les uns avaient besoin de sel, et les autres voulaient de l’or.

L’or qu’on apporte à Melli se divise en trois parts : une qu’on envoie par la caravane de Melli à Kokhia, sur la route du grand Caire et de la Syrie ; les deux autres à Tombouctou, d’où elles partent séparément, l’une pour Tret, et de là pour Tunis en Barbarie ; l’autre pour