Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 2.djvu/34

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temps de ce divertissement est la nuit, à la lueur de la lune.

Rien ne causait tant d’admiration à ces barbares que les arquebuses et l’artillerie de la caravelle portugaise. Cadamosto ayant fait tirer un coup de canon devant quelques Nègres qui étaient montés à bord, leur effroi se fit connaître malgré eux par de violentes agitations, et parut croître encore lorsqu’il leur eut déclaré que d’un seul coup de cette furieuse machine il pouvait ôter la vie en un instam à cent Maures. Après être un peu revenus de leur frayeur, ils déclarèrent à leur tour qu’une chose si pernicieuse ne pouvait être que l’ouvrage du diable. Leur étonnement fut plus doux lorsqu’ils entendirent le son d’une cornemuse. Les différentes parties de cet instrument leur firent croire, d’abord que c’était un animal qui chantait sur différens tons. Cadamosto, riant de leur simplicit , les assura que c’était une simple machine, et la mit entre leurs mains sans être enflée. Ils reconnurent que c’était effectivement l’ouvrage de l’art ; mais ils demeurèrent persuadés que des sons si doux et si variés ne pouvaient venir que du pouvoir divin, en donnant pour raison qu’ils n’avaient rien entendu de semblable. Tout leur paraissait également admirable, jusqu’aux moindres instrumens du vaisseau. Ils répétaient sans cesse que les Européens devaient être des sorciers beaucoup plus habiles que ceux de leur pays, et peu inférieurs au diable même ; que les voyageurs de terre