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s’était attendu à recevoir, la visite et les présens du général français ; mais il vit ses espérances trompées. L’alcadi de Rufisque , et une femme mulâtre qui avait suivi Brue avec quelques Français que la seule curiosité conduisait, se mirent à genoux devant le marabout, et lui baisèrent les pieds ; après quoi il prit la main de la signora, l'ouvrit et cracha dedans. Ensuite la lui faisant tourner trois fois autour de la tête, il lui frotta de sa salive le front, les yeux, le nez, la bouche et les oreilles, en prononçant, pendant cette opération, quelques prières arabes. Il reçut leurs présens, et leur promit un heureux voyage. La signora fut raillée de sa superstition à son retour, et de s’être laissé oindre de la salive du vieux marabout.

Le jour suivant, comme la marche était fort lente, Brue se donnait le plaisir de la chasse en chemin. Au milieu des bois, il découvrit les traces de quelques éléphans, et bientôt il en aperçut dix-huit ou vingt, les uns couchés comme un troupeau de vaches, d’autres occupés à baisser des branches, dont ils mangeaient les feuilles et les petits rameaux. La caravane n’en était pas à la portée du pistolet. Cependant, comme il ne paraissait pas qu’ils y fissent attention, les gens du général leur tirèrent quelques coups de fusil, auxquels ils ne parurent pas plus sensibles qu’à la piqûre des mouches, apparemment parce que les balles ne les touchèrent que par-derrière ou aux côtés, dans les endroits où leur peau est impénétrable.