Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 21.djvu/130

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Moraves en Allemagne, elle fit tant de progrès, qu’on la mit à la tête du bercail des sœurs du Groënland. Elle catéchisait, prêchait, enseignait ; elle écrivit plusieurs lettres dont Crantz donne un léger extrait. Entre autres, avant que de mourir, elle dicta ces mots pour une de ses sœurs spirituelles avec qui elle s’était intimement liée à Herrnhut. « Ma chère amie, je vous envoie le dernier baiser de mon cœur. Mon tabernacle tombe de faiblesse ; mais je verrai bientôt les blessures de l’Agneau. Je salue encore une fois toutes les sœurs qui sont avec vous. Je me sens trop épuisée pour en dire davantage. Votre chère Judith. » Ainsi meurent les inspirés du Groënland, avec le langage des premiers apôtres du christianisme, répétant dans leurs lettres les épîtres de saint Paul, et se croyant aussi remplis que lui des dons de l’esprit saint. Ils vivent dans l’erreur, mais ils meurent contens.

La suite des annales du Groënland ressemble au commencement. Ce sont toujours des prêcheurs illuminés, qui, par des discours inintelligibles, attirent des sauvages stupides à des cérémonies, ridicules sans doute, puisqu’elles ne sont pas consacrées au culte de la véritable église. Car, en ce genre, tout ce qui n’est pas révélé devient absurde, et ne peut qu’indigner la raison. Ainsi l’on doit faire grâce au lecteur de toutes les oraisons jaculatoires dont Crantz a rempli les trois quarts d’un assez gros volume. S’il espère par cette pieuse adresse augmenter