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pas des progrès bien rapides, les Groënlandais ne pouvant élever leur raison au delà de l’idée d’un Dieu. Les mystères du péché originel et de la rédemption n’entraient point dans leur faible intelligence. Quand on leur en parlait, ils redisaient toujours, nous croyons tout ; et cette réponse signifiait qu’on ne leur en parlât plus. Mais un d’entre eux donnant plus d’essor à ses réflexions, dit un jour aux catéchistes : « Est-ce que Dieu n’entendit pas le serpent quand il séduisit Ève par ses discours ? et s’il l’entendit, pourquoi n’avertit-il pas la femme de s’en défier, et ne prévint-il pas la chute du premier homme ? » Ainsi la stupidité des uns et le raisonnement des autres retardaient les fruits de la prédication de l’Évangile.

Les mœurs des Groënlandais étaient encore bien éloignées de ce que les Herrnhuters appelaient le royaume du ciel. Une vieille femme était morte la nuit, ou du moins l’avait paru. Son fils l’enveloppa d’abord dans une peau pour l’ensevelir. Mais une heure après elle poussa des cris lamentables. Un missionnaire obtint du fils qu’il découvrît le visage de sa mère pour y chercher quelque signe de vie ; mais comme elle ne parla point, on la remit dans son enveloppe mortuaire. Peu de temps après on entend de nouveaux gémissemens ; le fils découvre sa mère, et lui met dans la bouche un peu de graisse de poisson qu’elle avale, mais sans parler. On la recouvre encore ; enfin, au troisième réveil, elle répondit à des questions, et le mis-