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les eussent enlevées dans la nuit : c’était déjà quatre ancres de moins depuis vingt-quatre heures, et cependant il nous restait encore des pertes à essuyer.

» À dix heures du matin le câble neuf que nous avions entalingué sur l’ancre de deux mille sept cent de l’Étoile, laquelle nous tenait dans le sud-est, fut coupé, et la frégate, défendue par un seul grelin, commença à chasser en côte. Nous mouillâmes sous barbe notre grande ancre, la seule qui nous restât en mouillage ; mais de quel secours nous pouvait-elle être ? Nous étions si près des brisans, que nous aurions été dessus avant d’avoir assez filé de câble pour que l’ancre pût bien prendre fond. Nous attendions à chaque instant le triste dénoûment de cette aventure, lorsqu’une brise du sud-ouest nous donna l’espérance de pouvoir appareiller. Nos focs furent bientôt hissés ; le vaisseau commençait à prendre de l’air, nous travaillions à faire de la voile pour filer câble et grelin et mettre dehors, mais les vents revinrent presque aussitôt à l’est. Cet intervalle nous avait toujours donné le temps de recevoir à bord le bout du grelin de la seconde ancre à jet de l’Étoile, qu’elle venait d’allonger dans l’est, et qui nous sauva pour le moment. Nous virâmes sur les deux grelins, et nous nous relevâmes un peu de la côte. Nous envoyâmes alors notre chaloupe à l’Étoile pour l’aider à s’amarrer solidement ; ses ancres étaient heureusement mouillées sur un fond moins perdu de corail