Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 23.djvu/72

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

un arbre creusé en forme le fond ; les côtés sont en planches ; elles ont une voile d’une natte fine, et un balancier ; leurs cordages et leurs filets n’annoncent pas moins d’industrie. Ils nous proposèrent instamment d’aller à terre, en nous offrant de laisser comme otages sur la corvette un nombre égal d’hommes à celui que nous voudrions envoyer chez eux ; cette proposition me charma, et j’y aurais volontiers consenti, si le vaisseau n’eut pas été entraîné par un fort courant à une si grande distance à l’ouest, que je n’eus pas le temps de chercher un mouillage ; et la nuit survenant, je continuai ma route. Quand ces insulaires s’aperçurent que nous les quittions, l’un d’eux demanda instamment de venir avec nous ; et, malgré les représentations de ses compatriotes et les miennes, malgré tout ce que nous pûmes faire, il refusa opiniâtrement de retourner avec eux. Comme je pensai qu’il pourrait contribuer à nous faire faire des découvertes utiles, je n’employai pas la force pour le renvoyer à terre, et je le gardai : il me dit qu’au nord se trouvaient des îles dont les habitans avaient du fer, et s’en servaient pour tuer ses compatriotes quand ils les rencontraient en mer. Au bout de quelques jours je m’aperçus avec douleur que la santé de ce bon Indien, à qui j’avais donné le nom de Joseph Freewill (de bonne volonté) à cause de son empressement à venir avec nous, s’altérait sensiblement et alla toujours en déclinant jusqu’à notre arrivée à Célèbes, où il mourut.