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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 29.djvu/170

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sa fille, et de la livrer à un autre qui sera peut-être plus libéral ; l’homme, de son côté, peut toujours former un nouveau choix. Si sa maîtresse devient grosse, il est le maître de tuer l’enfant, et de continuer ses liaisons avec la mère ou de l’abandonner ; mais s’il adopte l’enfant, et s’il ne lui ôte pas la vie, il est censé marié, et il garde communément sa femme le reste de ses jours. Aux yeux des Taïtiens, ce n’est pas un crime de prendre une concubine plus jeune et de l’établir dans sa maison : il est toutefois bien plus commun de les voir changer de femmes ; et c’est une chose si ordinaire, qu’ils en parlent d’un ton fort léger. Les arreoïs sont des insulaires des classes supérieures qui, joignant à une humeur volage des moyens de se procurer de nouvelles femmes, voyagent d’un canton à l’autre ou sur les îles voisines, et qui, ne se livrant pas à un attachement particulier, n’adoptent guère la manière de vivre plus sédentaire et plus tranquille dont je viens de parler. Cette vie délicieuse est si analogue à leur disposition, que les plus jolis hommes et les plus jolies femmes passent ordinairement leur jeunesse dans une débauche qui déshonorerait les peuples les plus sauvages, mais qui révoltent surtout au milieu d’une nation qui offre, à d’autres égards, des signes évidens que les sentimens humains et tendres règnent chez elle. Lorsqu’une femme arreoï accouche, on applique à la bouche et au nez de l’enfant un morceau d’étoffe mouillée qui le suffoque.